Red Dead Redemption 2 « Quand on tire, on raconte pas sa vie »

Et si l’on s’occupait du jeu le plus attendu de l’année 2018 ? Red Dead Redemption 2, sorti le 26 octobre 2018, développé et édité par Rockstar (créateur notamment de Grand Theft Auto). Troisième opus de la saga des Red Dead, Red Dead Redemption 2 est une préquelle de Red Dead Redemption dans laquelle on suit les aventures du gang dans lequel se trouvait John Marston (protagoniste de Read Dead Redemption). Il n’est sorti que sur Xbox One et sur PS4, la sortie PC n’étant pas prévue, tradition de la saga. On joue ici Arthur Morgan et l’on mène la joyeuse troupe de son chef Dutch à travers l’Amérique – direction Est – , fuyant de plus en plus les pionniers Pinkerton tout en ayant pour but de revenir vers l’Ouest. Pour cela, le joueur doit progresser dans un open world alléchant et largement inspiré du premier volet. J’ai déjà fait une critique de ce dernier (magazine de mai 2018) qui demeure parmi les meilleurs jeux de tous les temps pour moi. Et après plusieurs dizaines d’heures de jeu sur le second, je suis prête à vous dévoiler ce que je pense de sa suite. Si jeuxvidéo.com lui attribue la très modeste note de 19/20, je serai un peu plus dure.

Ce qui est indéniable, c’est que c’est beau…

Bon, ça on ne peut pas dire le contraire. Le jeu est beau, très beau. On a tous voulu savoir à quoi ressemblerait Blackwater (la plus grande ville dans Red Dead Redemption premier du nom) avec un game engine aussi performant que celui de Rockstar (qui s’appelle gentiment le RAGE). Et c’est fait ! Loin de voir des broussailles à moitié en 2D, on traverse de vraies prairies, avec de vrais arbres et de vrais buissons.

Trêve d’émerveillement, qu’est-ce qui rend le jeu si plaisant visuellement parlant ? Déjà, on peut parler de la diversité d’environnements. Des prairies à la forêt tropicale, on se perd dans une nature abondante et détaillée où les animaux font vraiment partie du décor. La partie de l’histoire dans la neige, bien qu’elle soit courte, est jouissive. Rockstar nous propose de jouer dans un environnement totalement nouveau qui affecte votre joueur et sa monture tout au long de l’histoire. Si le soleil est perché toute la journée dans le ciel, votre personnage aura chaud et cela réduira ses capacités. Pareil pour votre monture, qui sera moins efficace s’il traîne dans la boue durant une averse. Bien plus qu’un environnement magnifique, c’est un open world  qui affecte vraiment notre gameplay.

Les environnements sont magnifiques, optimisés spécialement pour les consoles. Photo: Rockstar Games

Le jeu crée une ambiance pour chaque endroit dans lequel on pénètre, on peut par exemple traverser un cimetière dont les seuls bruits sont l’orage grondant au loin et les sabots de notre cheval foulant la poussière. La lumière est utilisée de manière brillante, et cela est particulièrement visible durant les chevauchées dans les forêts où les rayons du soleil se faufilent entre les grands arbres. C’est vraiment un plaisir pour les yeux. De toute manière, nous n’en attendions pas moins de ce jeu. Même l’eau (qui est un facteur “déterminant” dans un open world selon les esthètes du jeu vidéo) est d’une qualité incroyable. Car oui, enfin, on peut profiter de l’eau. Si John Marston ne sait absolument pas nager, Arthur Morgan peut faire quelques brasses (avant de faire une crise d’asthme). Pour faire court, Red Dead Redemption 2 : c’est beau, mais pas que. C’est avant tout  un très bon open-world.

Un des nombreux panoramas que vous pouvez admirer dans le jeu . Photo: Rockstar Games.

…et il est vrai que c’est sacrément bien organisé…

On retrouve beaucoup de mécanismes qui marchaient bien dans le premier Red Dead Redemption. Par exemple, les random encounters (des rencontres avec des PNJ, n’importe où sur la carte, qui mènent à de petites quêtes) sont de retour. Certains d’entre eux sont tout droit recyclés du premier jeu, la méfiance est donc de mise avec les gens qui « ont été blessés et que l’on doit ramener à cheval jusqu’à la prochaine ville ». Je viens à peine de commencer la collection, mais pour l’instant ils sont à la hauteur de ce qu’on pourrait attendre d’un jeu aussi complet.

Un autre élément de gameplay qui change : c’est la chasse. Très Far Cry-esque (Ubisoft), on se sert la plupart du temps de l’arc ou de son couteau pour éviter d’endommager la viande ou la peau. Mais le plus important reste que : Arthur ne peut stocker qu’un seul animal sur son cheval. Dans le premier, on pouvait ramasser autant de peaux que l’on souhaitait, et John Marston les stockait dans sa sacoche de type Tardis – plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur – (dédicace aux fans de Doctor Who). Dans Red Dead Redemption 2, finit le farming intensif de peaux d’ours, on se débrouille comme on peut pour gagner de l’argent : et c’est pas plus mal !

J’avouerai avoir eu sacrément peur quand j’ai vu des jauges type RPG – de faim et d’endurance –, par exemple. Le jeu étant en grande partie basé sur l’action-aventure, j’ai cru comprendre que l’on devrait s’arrêter toutes les heures pour chasser un lapin. Heureusement, Rockstar a prévu que le jeu deviendrait très pénible. Les barres sont bien là, en bas à gauche de votre écran. Mais, heureusement, Arthur Morgan peut vivre uniquement d’amour et d’eau fraîche. Ce qui se traduit dans le jeu par du whisky et du whisky. Ce n’est pas une blague. On peut survivre tout le jeu en buvant du whisky. Un jeu de qualité. (L’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération blablabla).

Un exemple d’une session de chasse

On a un open world qui marche bien et qui s’organise de manière ravissante dans les villes. Tout est plus vivant, plus agréable. Les mini-jeux (jeu du couteau, blackjack etc) sont toujours aussi distrayants et les magasins sont déjà plus intéressants en organisant la vente sous forme de catalogues. On pourrait y passer des heures (je passe des jours entiers dans les villes).

En revanche, on se passera de commenter le gameplay de déplacement du personnage toujours aussi limité que Rockstar se refuse à changer. Pour ne pas citer : le fait que l’on doive appuyer 10 000 fois sur le bouton A pour faire courir le personnage (comme une vraie voiture en plein hiver, faut chauffer le moteur). Ou bien l’auto-aim, TRADITION insupportable dans les jeux Rockstariens (?) qui rendent les fusillades vraiment trop simples. On ne change pas une équipe qui gagne, je suppose…

Valentine, une des premières villes qui s’offrent à vous dans le jeu . Photo: https://reddead.fandom.com/wiki/Valentine

…mais c’est terriblement barbant.

Alors pourquoi est-ce que ce jeu m’a déçue ? Si l’objectif était de faire des promenades à cheval saupoudrées de conversations quasi philosophiques, alors autant en faire un documentaire. Le jeu est tristement ennuyeux. On passe 70% de son temps à cheval, les distances entre le point de départ et le point d’arrivée ont été drastiquement allongées depuis le premier. On se retrouve dès le départ à devoir traverser la carte plusieurs fois durant une mission pour pouvoir atteindre tous les interlocuteurs. Certes, les développeurs tentent de rendre ça moins long en ajoutant des dialogues entre les trajets. Mais la multiplication des conversations couplée à leur manque de profondeur rend leur utilisation peu efficace. On se retrouve à discuter souvent du futur des gangs après la fin de la « conquête de l’Ouest », du passé de certains personnages etc. Certes les dialogues sont très bien faits, authentiques à souhait, mais Rockstar nous a habitués à l’effort qu’ils mettent dans leurs doublages. Le problème, c’est que c’est lent. Très lent. On passe plusieurs dizaines de minutes à se déplacer entre un point A et un point B et l’histoire met beaucoup de temps à se développer. Pour un jeu d’action, c’est impardonnable. Surtout lorsqu’on commence à se demander si Red Dead Redemption ne se transforme pas en un « walking game », c’est à dire un jeu où le seul but est d’errer à travers le monde que l’on nous offre.

Un peu de promenade, histoire de vous montrer les distances qui peuvent être parcourues

Les missions sont… tristement répétitives. Sauver celui-ci, amener celui-là à tel endroit. C’est vrai que le jeu se base en grande partie sur la survie de votre camp, où votre groupe a souvent besoin de vous pour régler les différents problèmes. Malheureusement, le manque cruel d’originalité dans la trame principale laisse à désirer. Le chapitre 5 (chapitre « escapade » comme je l’appellerai pour éviter les spoils) ne change en rien la donne. On s’attend à une bouffée d’air, mais on ne se sent pas à sa place et très vite cela influe sur la motivation tout au long du gameplay.

Ce qui rattrape tout ça et de manière majestueuse, c’est le développement des personnages. Je les trouve fabuleux. Leur développement dans l’histoire est très très bien mené. L’évolution de Dutch, à peine perceptible, jusqu’à devenir le vieux fou que l’on connaît dans le premier jeu, la rédemption d’Arthur Morgan qui devient de plus en plus honorable… C’est peut-être ce qu’il y a de plus réussi dans ce jeu. Et puis, bien évidemment, on ne se lassera jamais du glorieux John Marston, également présent dans ce volet, avec qui j’adorais passer mon temps. Il m’avait tant manqué ! ):

Et je pense qu’il y a beaucoup de potentiel, comme le montrent les 5000 pages de script écrites pour le jeu. Mais ce potentiel a été laissé de côté au profit de l’aspect open world du jeu. Écrire 5000 pages de dialogues : ok. Mais leur utilisation est tout aussi importante.Il y a une différence entre les dialogues incessants et inutiles à cheval et ceux des cinématiques. Ces derniers sont vraiment cools et développent les personnages. Ceux à cheval sont à 80% inutiles. Là où Red Dead Redemption était une histoire poignante, Red Dead Redemption 2 ne parvient pas à m’entraîner dans la trame principale.

Arthur Morgan, protagoniste du jeu. Photo: https://reddead.fandom.com/fr/wiki/Arthur_Morgan

Finalement, Red Dead Redemption 2, c’est avant tout un des meilleurs jeux jamais développés. Il est magnifique, son open world marche très bien (si on oublie les dizaines de bugs recensés sur internet) et certaines formes de gameplay sont innovantes. Mais malgré cela, je peux affirmer que le jeu n’atteint pas la prestance de son grand frère, Red Dead Redemption. Le manque d’histoire cohérente est un point essentiel qui me freine pour mettre une très bonne critique à ce jeu. C’est parler beaucoup pour ne rien dire. Mais honnêtement, jouez-y. Il deviendra indubitablement un classique dans quelques années. Et puis, une partie de chasse, pêche et tradition pendant quatre heures, ça ne se refuse pas…

PS : Un petit Undead Nightmare 2 s’il vous plaît Rockstar ??

Bien sûr, je vous laisse avec la magnifique OST du jeu.

Supertramp

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